ROBERT HOSSEIN – acteur – metteur en scène
PM : Etant donné vos origines russes – votre père est originaire de Samarkande et votre mère, de Kiev, et vous avez fréquenté dans votre enfance les établissements scolaires russes, avez-vous un int2rêt particulier pour le cinéma russe?
RH : Je m’intéresse à tous les cinémas du monde lorsqu’ils sont bons, particulièrement au cinéma américain, russe, français, italien et allemand selon les époques. En ce qui concerne le cinéma russe j’ai vu tous les grands films classiques des grands metteurs en scène Poudovkine, Paradjanov, Tarkovsky etc…De même que je connais toute la littérature et la musique russe (mon père était compositeur) mais j’en sais autant sur l’Amérique, l’Allemagne, ce sont des choses qui m’ont passionnées pendant des jours et des nuits, je dors peu donc je lis, je regarde, j’écoute.
PM : Trouvez-vous intéressant le cinéma russe de l’époque actuelle ?
RH : Je ne connais que quelques films récents et c’est pour cela que je me réjouis de participer à ce Festival pour découvrir les nouveaux films et les nouveaux talents, acteurs, metteurs en scène, scénaristes etc… tout cela est très passionnant. Le cinéma russe actuel n’a peut-être pas les moyens pour être à la hauteur de ce qu’il était mais je connais beaucoup de metteurs en scène de talent – j’ai été plusieurs fois à Moscou – et je regrette que l’on ne voie pas plus de films russes en France.
D’ailleurs je serai tout à fait ravi de participer à un film russe en tant que comédien.
PM : Vous-a-t- on fait des propositions dans ce sens ?
RH : Non, je n’en ai jamais parlé mais si cela se présentait j’en serai ravi . La Russie est un pays que je connais bien pour y avoir été de nombreuses fois pour des festivals où nous avons d’ailleurs été primés et j’aime ce pays.
PM : Votre activité actuelle est d’avantage centrée sur le théâtre.
RH : Comme slogan il est marqué chez nous : « Du théâtre, vous n’en verrez qu’au cinéma ». Dans « Bonaparte » par exemple il y a beaucoup de projections car impossibles à faire jusqu’à il y a un mois : on vient de découvrir une machine nous permettant de découper des tableaux de maître avec exactitude et de faire des travellings, des mouvements panoramiques etc…et ce rétro-projecteur situé à trois mètres envoie les images sur écran géant, c’est fantastique ! Sur le plan de la technologie des recherches au service du spectacle se poursuivent sans arrêt.
Je crois bientôt à un cinéma interactif
PM : Cinéma interactif, c’est à dire ..?
RH : C’est de pouvoir balancer le public dans l’image pour être tout à coup dans l’action on voit une troïka dans la neige et tout à coup le spectateur est dans la troïka et il roule dans la neige ! C’est ça qui est intéressant : nous avons découvert, nous, l’interactivité, la participation du public, son vote, c’est passionnant. Je pense que ce sera l’avenir, obligatoirement.
PM : Quel est votre film russe favori, en dehors des grands classiques ?
RH : Un très beau film que j’ aime beaucoup et que je considère comme un chef-d’oeuvre est « Les chemins de la vie » (« Poutievki Jizni ») et puis « Le député de la Baltique » c’est aussi un film formidable, « La jeunesse de Gorki », c’est superbe, il y a des films admirables et ce sont des metteurs en scène géniaux. Je m’étonne qu’il n’y ait pas eu quelqu’un qui ait fait « Les dix jours qui ébranlèrent le monde » en russe. Et puis je m’intéresse à tous les films que l’on a fait sur Tchékhov, et tous les auteurs classiques, Je connais bien les poètes russes .
PM : N’avez-vous pas été tenté de prendre un personnage russe pour thème d’une pièce ?
RH : Oui, j’ai pensé à Ivan le Terrible, Pierre Le Grand, ce sont de personnalités passionnantes, je voulais aussi monter « Guerre et Paix » mais pour l’instant je rêverai de faire un film en hommage à Tchoukraï qui a réalisé le film « Le quarante et unième » – le même thème et les mêmes situations mais le tout situé ailleurs qu’en Russie.
PM : Cela vous plairait-il de diriger des acteurs russes ?
RH : Absolument, il y a des projets, mais les spectacles que je monte sont tellement lourds à transporter, il faut beaucoup de temps pour s’installer mais j’ai toujours rêvé de monter les Evangiles sur la Place Rouge, comme j’ai monté ici « Un homme nommé Jésus » d’autant plus que personne ne parle, il n’y a que ceux qui racontent.
PM : Envisagez-vous de présenter un de vos grands spectacles en Russie ?
RH : J’ai eu des propositions pour « Bonaparte » et « Crime et Châtiment » et même « Huit-Clos » mais cela demande du temps, il faut s’organiser, faire les choses sérieusement avec des partenaires opérationnels.
PM : Pour monter un spectacle comme « Bonaparte » que l’on peut actuellement voir à Paris, combien de temps cela vous-a-t-il pris?
RH : Deux ans. Je l’ai dédié à Abel Gance, « Crime et Châtiment » était dédié à Stanislavsky.
PM : Quels sont vos projets ?
RH : J‘ai des rêves.. et je n’en parle pas tant qu’ils ne sont pas réalisés, mais la prochaine fois que je vais tenter de faire quelque chose ça me prendra autant de temps – ce ne sera pas avant 2004. Entre temps je ferai quelque chose ici, au Théâtre Marigny , je travaille beaucoup avec mes collaborateurs, un spectacle est un travail d’équipe, il y a l’écriture, l’adaptation, le découpage, les moyens etc… etc…
PM : Le Grand Prix de la Fondation Napoléon vient de vous être attribué.
RH : Nous en sommes très heureux , il nous sera remis le 27 de ce mois.
PM : Entre temps vous présiderez donc le Jury du Xème Festival de Honfleur.
RH : Ayant une grande passion pour la littérature, la musique, la foi russe, et parlant couramment la langue russe, je n’y vais pas comme un inconnu dans le désert !